CAA Versailles 11-10-2016 n° 14VE02651
Dans cette affaire l’administration fiscale française reprochait à Philips France d’avoir minoré ses prix de transfert en déduisant des coûts de R&D qu’elle devait refacturer avec une marge de 10% à sa société sœur KPE NV les subventions qu’elle perçu au titre de ses activités de recherche.
Il est intéressant de relever que l’administration ne contestait ni la méthode utilisée ni la marge appliquée.
La rectification reposait notamment sur deux arguments
1 – Le contrat de prestation de R&D ne prévoyait pas explicitement que les subventions reçues devaient venir en déduction des coûts
2 – Une analyse de transactions comparables montre que de telles subventions ne sont pas normalement déduites.
Le TA de Montreuil (TA Montreuil, 1re ch., 1er juill. 2014, n° 1206254, SAS Philips France) avait suivi l’administration en considérant que les stipulations du contrat-cadre précité ne justifiait pas cette déduction, celles-ci indiquant que « les coûts nets relatifs aux activités de recherche supportés par la SAS Philips France sont refacturés à la société KPE NV augmentés d’une marge de 10 % tenant compte des prix du marché et des risques supportés et qu’en contrepartie, la propriété des droits incorporels qui résultent des activités de recherche réalisées par la SAS Philips France est transférée à la société KPE NV ».
Il considérait que l’administration avait établit que la société KPE NV, qui a indirectement profité de la subvention publique, a bénéficié d’un avantage de la part de la SAS Philips France, laquelle est dès lors présumée avoir réalisé, un transfert de bénéfices.
Et qu’il incombait à la SAS Philips France de prouver que ce transfert comportait une contrepartie au moins égale à l’avantage ainsi procuré.
Mais la cour administrative d’appel ne retient manifestement pas ce premier argument et se reporte ainsi sur le deuxième argument : l’analyse des transactions comparables.
Argument qu’il écarte sans équivoque en retenant qu’en tout état de cause les entités comparables ne sont pas indépendantes.
Ce qu’il faut retenir :
1 –Il faut attacher une attention particulière à la rédaction des contrats intra-groupe.
Si le contrat Philips avait prévu que les subventions venaient en réduction des coûts, le jugement du TA aurait été défavorable à l’administration. Mais si ce contrat avait intégré un détail des coûts à prendre en compte sans faire apparaître la déduction éventuelle de subvention, il n’est pas exclu que la CAA aurait suivi l’administration sans se préoccuper des comparables.
2 – La facturation de prestation de R&D en cost + 10% est généralement admise comme un standard. La question de la déduction des subventions et notamment du CIR oppose souvent l’administration aux entreprises, mais le juge ramène cette question sur le seul terrain autorisé, celui de l’analyse de comparabilité. Cette déduction est par ailleurs explicitement prévue par certaines réglementations et notamment celle des Pays-Bas (Transfert Pricing Decree, nov. 26, 2013, IFZ 2013/184M, art. 13).
3 – L’administration fiscale française est souvent perdante sur le terrain des comparables (Cf : CE 7-11-2005 n° 266436 et 266438 – Cap Gemini ; CAA Paris 25-6-2008 n° 06-2841, Sté Novartis Groupe France SA ; CAA Versailles, 5-12-2011 n° 10VE02491, SAS Unilever ; CAA Versailles 5-5-2009 n° 08VE02411, Man et Camion Bus).
Ce n’est pas nécessairement une bonne chose, car une situation trop déséquilibré conduira nécessairement à réviser les règles du jeu avec un effet de balancier au détriment des entreprises.